
Christian Urbita, le luthier qui murmure à l’oreille des arbres
A Cordes-sur-ciel, dans le Tarn, Christian Urbita vient de terminer le dernier violon de Renaud Capuçon. Rencontre avec un luthier pas comme les autres, pour qui la qualité d’un violon naît de la rencontre entre un arbre, des plantes, et un musicien.
Extraits :
[…] J’ai commencé mon apprentissage en Allemagne, au milieu des années 1970, et c’est seulement en 2003 que j’ai eu un déclic. Qu’est ce qui fait la différence entre une copie de Stradivarius et un vrai Stradivarius ? Quand on les regarde il n’y a aucune différence. Il y en a un qui va sonner très très bien, et l’autre auquel il va manquer quelque chose. Ce n’est pas une question d’épaisseur, de vernis, de façon de le fabriquer, c’est dans le bois. Je me suis dit : « Il faut arrêter, et chercher l’idée dans l’arbre ».
Chercher l’idée dans l’arbre ?
Les violons, on peut dire quelque part qu’ils sont vivants, alors que beaucoup d’instruments ne sonnent pas parce qu’ils sont – entre guillemets – morts. J’ai appris le ressenti de la vie, la force vitale. On sait qu’un arbre est vivant puisqu’on le voit grandir, et il y a cette force vitale dans l’arbre qu’il faut maintenir. Il faut le couper à la bonne période, quand il est à l’apogée de son activité, de son énergie. Il faut le couper à la bonne lune…
La lune influence la qualité du bois ?
Oui bien sûr. Si vous regardez bien, pendant les périodes de pleine lune, les feuilles sont plus vertes, l’eau qui est dans l’arbre change selon les phases. De même, si on coupe en hiver, quand l’arbre est au repos, il est très dense mais il est à moitié mort. Avant, on le laissait sécher pendant 5, 10, 20 ans… On disait même que 100 ans c’était encore mieux ! Et là, le bois est complètement mort. Essayer de faire un objet actif, vivant, avec un arbre mort, c’est impossible.
Mais travailler avec du vivant, c’est un gros problème. On arrive avec un arbre qui est plein de sève, et il faut savoir le gérer. Il y a des arbres qui ont fermenté, donc ils deviennent verts et perdent leur qualité… A force, j’ai appris comment gérer et maintenir cette énergie dans le bois.
L’énergie ?
Oui. Quand je vais en forêt, je ressens, j’entends les arbres, ils me parlent (rires). C’est une relation qui se crée. Les arbres, plus ils sont vieux, plus ils sont riches… Ils ont des choses à dire. On a oublié tout ça, mais un arbre entend, écoute, ressent des choses. Il y a des arbres, en fonction de l’endroit où ils ont poussé, qui sont plus ou moins énergétiques. Quelque part, il y a quelques violons dans un arbre et mon rôle est de savoir où est le violon pour un musicien bien précis.
Vous entendez les arbres depuis toujours ?
Non. Avant, je ressentais les choses sans pouvoir les comprendre. J’ai donc rencontré un magnétiseur, on s’est vu régulièrement pendant une dizaine d’années car j’avais du mal à croire en ces choses. Avec lui, j’ai appris à ressentir tout ça. Mais ça m’a pris beaucoup de temps. Je ne suis pas chaman, je suis luthier. Quand on coupe un arbre, il y a un minimum de respect à avoir par rapport à lui, et il faut lui demander, demander à la vie : « Est-ce que je peux te couper ? »
Luthiers du pays de Fontainebleau

Luthier de la forêt
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