
Presque tous les traités de poésie ont été écrits au dix-septième et au dix-huitième siècle, c’est-à-dire aux époques où l’on a le plus mal connu et le plus mal su l’art de la Poésie. Aussi, pour étudier, même superficiellement, cet art, qui est le premier et le plus difficile de tous, faut-il commencer par faire table rase de tout ce qu’on a appris, et se présenter avec l’esprit semblable à une page blanche. (p.1)
[…] L’outil que nous avons à notre disposition est si bon, qu’un imbécile même, à qui on a appris à s’en servir, peu, en s’appliquant, faire de bon vers. Notre outil, c’est la versification du seizième siècle, perfectionnée par les grands poètes du dix-neuvième, versification dont toute la science se trouve réunie en un seul livre, La Légende des Siècles de Victor Hugo, qui doit être la Bible et l’Evangile de tout versificateur français. (p.2)
Théodore de Banville, Petit Traité de poésie française
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La Légende des siècles est un recueil de poèmes de Victor Hugo, conçu comme une œuvre monumentale destinée à dépeindre l’histoire et l’évolution de l’Humanité.
Écrits par intermittence entre 1855 et 1876, tant ses projets sont nombreux en ces années d’exil à Guernesey, les poèmes furent publiés en trois séries : en 1859, en 1877 et en 1883. Portée par un talent poétique estimé comme sans égal où se résume tout l’art de Hugo, après l’accomplissement des Châtiments et des Contemplations qui lui ont ouvert de nouveaux horizons, la Légende des siècles est considérée comme la seule véritable épopée française et, suivant le jugement porté par Baudelaire, comme la seule épopée moderne possible.
Devant lui, en rêve, le poète contemple le mur des siècles, vague et terrible, sur lequel se dessinent et se mêlent toutes les scènes du passé, du présent et du futur, et où défile la longue procession de l’humanité. Les poèmes sont la peinture de ces scènes éparses et aperçues fugitivement, dans un entremêlement de visions terribles. Hugo n’a recherché ni l’exactitude historique ni encore moins l’exhaustivité. Au contraire, il s’attache plus volontiers à des figures obscures, le plus souvent inventées, mais qui incarnent et symbolisent leur âge et leur siècle. Comme il l’annonçait lui-même dans la Préface de la Première Série, « C’est de l’histoire écoutée aux portes de la légende ». Les poèmes, tantôt lyriques, épiques ou satiriques, forment une suite de l’aventure humaine, cherchant non à résumer mais à illustrer l’histoire du genre humain, à témoigner, au sens originel du terme, de son long cheminement des ténèbres vers la lumière.
Ce livre, c’est le reste effrayant de Babel ;
C’est la lugubre Tour des Choses, l’édifice
Du bien, du mal, des pleurs, du deuil, du sacrifice,
Fier jadis, dominant les lointains horizons,
Aujourd’hui n’ayant plus que de hideux tronçons,
Épars, couchés, perdus dans l’obscure vallée ;
C’est l’épopée humaine, âpre, immense — écroulée.
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Manuscrit de La Vision d’où est sorti ce livre

Victor Hugo vers 1850
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