- FRANZ LISZT AU PIANO Josef DANHAUSER (1805 – 1845)
- Franz Liszt à Fontainebleau
- Franz Liszt, franciscain
- Portrait par Nadar
FRANZ LISZT AU PIANO
Josef DANHAUSER (1805 – 1845)

ANALYSE DU TABLEAU
La communion des artistes dans la musique
La scène, qui ne s’est sans doute jamais produite dans la réalité, se déroule vraisemblablement dans l’appartement parisien de Liszt. Comme tout salon romantique, celui du compositeur se caractérise par une accumulation d’objets hétéroclites témoignant de son goût pour l’Orient (le narguilé dans le coin gauche du tableau), pour le Moyen Âge (statue de Jeanne d’Arc à gauche sur la cheminée), pour la poésie de lord Byron (portrait à l’arrière-plan au-dessus de Rossini)… À noter aussi le désordre des partitions, négligemment posées sur le piano, dans un amoncellement confus pouvant évoquer une forme d’exaltation.
Au centre du tableau se trouve le pianiste : c’est lui le « mage » qui suscite le recueillement de l’assistance devant Beethoven. La partition posée sur le pupitre du piano (un instrument Graf) porte l’indication « »Marcia funebre sulla morte d’un Eroe » de Beethoven », soit la pièce (troisième mouvement de la Sonate pour piano n° 12 opus 26) jouée lors de ses funérailles en 1827. Le morceau est évidemment choisi pour sa teneur symbolique : le héros mort que célèbre cette marche funèbre, c’est Beethoven lui-même, dont le buste domine Liszt et ses auditeurs. Un échange s’établit entre le pianiste et la sculpture, Liszt ne regardant pas la partition mais plongeant son regard dans les yeux vides de l’illustre compositeur. Liszt rend hommage à Beethoven, qu’il admirait profondément et dont il était l’un des plus grands interprètes : à partir de 1835, il avait notamment organisé des concerts d’œuvres de Beethoven dans toute l’Europe. Notons enfin que le peintre, pour suggérer la filiation de Beethoven avec les jeunes artistes romantiques, a placé le buste du compositeur devant une fenêtre ouverte qui laisse voir un ciel orageux (allusion à la Symphonie pastorale ?) et une aurore, symbole de la musique nouvelle que Liszt, après Beethoven, s’attache à promouvoir dans ses récitals et ses propres compositions.
L’auditoire vit pleinement ce dialogue idéal rendu possible par la musique : les deux femmes, George Sand et Marie d’Agoult, par leurs poses alanguies, expriment le ravissement dans lequel les plonge l’art de Franz Liszt. George Sand, de face, dont les vêtements ressemblent à ceux de Liszt, paraît particulièrement touchée par la musique. Marie d’Agoult, de dos, regardant le pianiste, appuyant langoureusement sa tête sur l’instrument, communie visiblement avec lui dans une ferveur intense. Danhauser évoque ainsi l’effet profond que le jeu de Liszt exerçait sur les femmes : les couleurs intenses et chaudes qui leur sont associées (manteau rouge de Sand, châle brun de Marie d’Agoult) sont comme des équivalents picturaux de leur émotion.
Les personnages masculins paraissent eux aussi sensibles à la musique, mais dans une moindre mesure : assis à la droite de George Sand – qui semble lui avoir fait fermer le livre qu’il a sur les genoux –, le romancier Alexandre Dumas est plongé dans une semi-obscurité contrastant avec la lumière qui frappe le visage de sa voisine. En revanche, Victor Hugo, poète, romancier, dramaturge, est mieux éclairé, comme pour souligner sa supériorité. Il s’appuie sur les dossiers des fauteuils de Sand et de Dumas : le créateur du drame romantique domine les deux autres écrivains de sa haute stature ; le rouge de son foulard est peut-être une allusion à l’éclatante couleur du gilet que Théophile Gautier avait arboré lors de la première d’Hernani en 1830, représentation suivie d’une bataille entre les partisans d’une rénovation dramatique et les conservateurs.
Enfin, à gauche d’Hugo, figurent les deux musiciens italiens les plus fameux de l’époque : le compositeur d’opéras Rossini et le violoniste virtuose Paganini. Rossini, rubicond, tient par l’épaule son compatriote, figure famélique et inquiétante qui, comme Liszt, était considéré comme un prodige à l’habileté diabolique. Paganini est représenté parce qu’il avait aussi profondément impressionné Liszt, qui l’avait entendu en 1832 dans un concert parisien : celui-ci avait décidé de rivaliser avec le violoniste en inventant une nouvelle technique pianistique, « transcendante ».
Derrière Rossini se trouve un portrait de lord Byron, un poète romantique anglais très reconnu.
INTERPRÉTATION
Une vision idéale de l’art romantique
Le tableau de Josef Danhauser illustre plusieurs thèmes essentiels du romantisme. Tout d’abord, Danhauser suggère la dimension européenne de ce courant : Byron, Hugo, Beethoven, Paganini, Liszt, sont de nationalités différentes, mais elles s’effacent toutes dans le culte de la musique. Liszt, en particulier, est le plus représentatif de ces artistes ouverts aux autres cultures européennes : de Budapest à Paris, de Weimar à Rome, son existence est une succession de périodes créatrices attachées à divers lieux. D’autre part, l’œuvre de Danhauser évoque la synthèse de tous les arts, thème cher aux artistes du XIXe siècle : par le biais de la peinture, il montre que la musique et la littérature sont réunies dans le culte du génie romantique par excellence, Beethoven. C’est lui qui apparaît ici comme le véritable inspirateur de l’art romantique : Liszt, Berlioz, Wagner, Schumann, Hugo lui-même, ne cesseront de le proclamer.
Source : https://histoire-image.org/etudes/franz-liszt-piano-culte-beethoven
Franz Liszt à Fontainebleau

Franz Liszt, franciscain

«Nous apprenons que le grand pianiste et compositeur François Listz a demandé et obtenu à Pesth son admission dans l’ordre de St-François. Les renseignements qui nous parviennent n’indiquent pas dans quelle partie de l’Ordre l’illustre musicien est entré. Il est vraisemblable qu’il ne s’agit que du Tiers-Odre. Quel bel exemple de l’union du culte des beaux-arts avec les sentiments et la pratique de la piété chrétienne!». C’est ainsi que le Journal de Toulouse relayait, le 12 février 1857, un bruit qui courait dans la presse et les salons de Paris. Pour fausse, cette rumeur n’en était pas moins en partie fondée, vraisemblable et prémonitoire, car Liszt avait bien demandé quatre mois plus tôt, en septembre 1856, à être admis comme confrater auprès des frères de Pest. Cependant, le ministre provincial de Pozsony (aujourd’hui Bratislava) ne signerait son diplôme qu’au mois de juin 1857. »
Franz Liszt, franciscain « du berceau jusqu’à la tombe »
Nicolas Dufetel
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01270363/document
Liszt se retire à Rome en 1861 et après avoir déjà rejoint le tiers-ordre franciscain en juin 1857, il recevra en 1865 la tonsure et les quatre ordres mineurs de l’Église catholique, lui donnant en France le qualificatif d’abbé. Il retourne à Pest où il doit diriger la création de son premier oratorio, Die Legende von der heiligen Elisabeth. Il se fait confectionner au couvent de Pest un habit franciscain dont il souhaite être revêtu au tombeau. Sa mère, Anna, meurt le 6 février 1866.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Franz_Liszt#Derni%C3%A8res_ann%C3%A9es
Portrait par Nadar

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