Vers alexandrin

Vers alexandrin

Le vers de douze syllabes ou vers alexandrin, qui répond à l’hexamètre des latins, a été inventé au XIIe siècle par un poète normand,  Alexandre de Bernay ; c’est celui de tous nos mètres qui a été le plus long à se perfectionner, et c’est de nos jours seulement qu’il a atteint toute l’ampleur, toutes la souplesse, toute la variété et tout l’éclat dont il est susceptible. Le vers alexandrin a une importance énorme, immense, dans la poésie française : car en même temps qu’il a sa place dans l’Ode et dans l’Epigramme, comme tous les autres mètres, en même temps, qu’il s’applique à l’Epitre, à l’Idylle et à la Sextine,  et que la plupart du temps il est le seul utilisé pour l’Epopée et pour la Comédie, (qui cependant peuvent aussi l’une et l’autre être écrites en vers de dix syllabes ou en vers de huit syllabes) il est également le seul vers employé dans la Tragédie et dans la Satire. Les vers des autres mesures s’emploient dans l’Ode, dans le Sonnet, dans le Rondeau redoublé, dans la Ballade, dans le Dixain, dans l’Octave, dans le Chant Royal, dans le Lai, dans le Virelai, dans la Villanelle, dans le Triolet, dans l’Epigramme et dans le Madrigal.

Théodore de Banville, Petit Traité de poésie française

Coupes de l’alexandrin

P.96

Dans sa remarquable prosodie, publiée en 1844, Mr Wilhem Tenint établit que le vers alexandrin admet douze combinaisons différentes, en partant du vers qui a sa césure après la première syllabe pour arriver au vers qui a sa césure après la onzième syllabe. Cela revient à dire qu’en réalité la césure peut être placée après n’importe quelle syllabe du vers alexandrin. De même il établit que les vers de six, de sept, de huit, de neuf, de dix syllabes admettent des césures variables et diversement placées. Faisons plus : osons proclamer la liberté complète et dire qu’en ces questions complexes l’oreille décide seule. On périt toujours, non pour avoir été trop hardi, mais pour n’avoir pas été assez hardi.

Théodore de Banville, Petit Traité de poésie française, p.96

NDLR Ici, Th. de Banville ne met pas en lumière le fait que toute coupure qui ne se place pas à l’hémistiche, si, bien sûr, elle ne détruit aucunement le vers,  introduit par rapport au vers alexandrin de référence, ou « vers en sortie de soirée » (Mallarmé, je crois) (6/6), un déséquilibre qui devra, comme tel, se résoudre, au bout d’un nombre de vers variable coupés selon leurs exigences, sur ce dernier. Nous retrouvons ici la notion musicale de tension/dissonance > résolution/repos, mais exprimée ici sur le plan essentiellement rythmique. Peut-être en parlera-t-il plus tard dans son traité lorsque il explorera plus en profondeur l’alexandrin. Il y a aurait aussi à dire sur cette question de l’oreille qui aurait le dernier mot, parce qu’il est plus question ici de « sentiment rythmique » que de perception sonore. Enfin le mot « oreille » renvoie sans doute dans son esprit à une totalité, celle qui allié la sonorité et le rythme ou « mouvement sonore », et donc une perception qui échappe à toute règle, du moins s’en émancipe. Parce que là aussi il faudrait aller plus loin dans la compréhension du mot « règle », sachant qu’il s’agit de l’observance d’un phénomène qui se reproduit et mettant ainsi en lumière une loi que l’on peut respecter ou transcender. La règle permet simplement de devenir plus conscient de certains phénomènes. Ce qui est aliénant c’est d’appliquer les règles sans les comprendre et sans chercher à tout moment à s’en émanciper.

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