

- La sainte Bohème, poème de Théodore de Banville
- Qu’est-ce que le lyrisme ?
- « De la tragédie religieuse pour les chrétiens »
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La sainte Bohème, poème de Théodore de Banville

Qu’est-ce que le lyrisme ?
C’est l’expression de ce qu’il y a en nous de surnaturel et de ce qui dépasse nos appétits matériels et terrestres, en un mot de ceux de nos sentiments et de celles de nos pensées qui ne peuvent être exprimés que par le Chant, de telle sorte qu’un morceau de prose dans lequel ces sentiments ou ces pensées sont bien exprimés fait penser à un chant ou semble être la traduction d’un chant.
Aussi peut-on poser comme un axiome que l’athéisme, ou négation de notre essence divine, amène nécessairement à la suppression de tout lyrisme dans ce qu’aux époques athées on nomme à tort : la poésie. C’est pourquoi cette prétendue poésie, comme l’a prouvé tout le XVIIIe siècle, est une chose morte, un cadavre.
La poésie ne se compose pas exclusivement de Lyrisme. Elle contient une partie consacrée aux choses matérielles et finies, qui est le Récitatif, et une partie consacrée à exprimer les aspirations de notre âme immatérielle, qui est le Chant. Mais, sans le Chant, sans le Lyrisme, elle n’est plus divine, et par conséquent n’est plus humaine, puisque l’homme est un être divin.
Théodore de Banville, Petit traité de poésie française
« De la tragédie religieuse pour les chrétiens »
(théâtre et poésie)
« On se demandera tout d’abord comment Cinna, Pompée, Oedipe, Rodogune, dont les sujets sont empruntés à l’histoire romaine, grecque et asiatique, peuvent être des tragédies religieuses pour des chrétiens. L’objection est inévitable et se dresse d’elle-même devant moi; mais il est facile d’y répondre. Avec la profonde intuition du grand poëte, Corneille dégagea l’idée fondamentale du christianisme, qui est le sacrifice, l’immolation de l’individu au devoir à un idéal supérieur à ses intérêts terrestres; et de cette idée, de plus en plus raffinée et sublimée, il fit le sujet de toutes ses pièces. Le Cid, c’est l’immolation de l’amour au sentiment filial; Horace, c’est l’immolation du ressentiment humain à la clémence quasi-divine; Polyeucte, c’est l’immolation et le sacrifice de tout amour terrestre à l’amour divin. La Tragédie de Corneille fut donc toujours religieuse, comme celle des Grecs; mais tandis que, chez les Grecs, elle l’était par l’assentiment unanime de tout un peuple et par la volonté du législateur, elle le fut chez Corneille par l’initiative et par l’instinct seul du poëte, ne trouvant d’aide et de ressource qu’en lui-même pour transporter dans le monde moderne, avec les qualités traditionnelles qui pouvaient le rendre durable, un poëme que les anciens seuls avaient possédé et connu. »
« Petit traité de poésie française » de Théodore de Banville (p.123)