La Renaissance française et le réveil du Liban

Portraits juxtaposés de François Ier et Soliman le Magnifique, réalisés séparément par Le Titien, vers 1530. 

  1. HISTOIRE – La Renaissance française et le réveil du Liban – Éclosion du pluralisme culturel
  2. La protection des chrétiens d’Orient, héritage de François Ier
  3. Soliman le Magnifique et François Ier : pourquoi étaient-ils alliés ?
  4. Voir aussi
HISTOIRE – La Renaissance française et le réveil du Liban – Éclosion du pluralisme culturel

Par BOUSTANY Hareth, le 18 octobre 2001

Depuis la fondation de l’Empire ottoman, la France, soucieuse de conserver ses bonnes relations avec l’Orient, trouva bon de renouer avec lui à travers les différentes ethnies qui y vivaient et qui avaient gardé intactes leurs coutumes et surtout leur culture. Le roi Henri IV rappela donc Savary de Brèves à Paris après qu’il se fut acquitté de sa mission à Constantinople, où il avait passé vingt-deux ans. Le roi de France voulait que cet intellectuel, connaisseur des usages et des coutumes de l’Orient et de l’histoire de ses populations, soit son représentant à Rome. Il lui assigna la mission de nouer des relations solides avec, d’une part, l’Église catholique et, d’autre part, les linguistes et exégètes orientaux, anciens élèves du Collège maronite de Rome dont la renommée de savants érudits avait déjà franchi les frontières. Savary de Brèves remplit sa mission à la perfection puisqu’une grande partie des élèves de ce collège prit le chemin de Paris et participa à l’enrichissement des premiers instituts d’études des langues et des civilisations orientales de la capitale française. C’est ainsi que Gabriel Sionita, Jean Hesronita et Abraham Hecchellensis, pour ne citer que ces trois érudits, s’appliquèrent à y faire connaître et à enseigner le syriaque, l’hébreu et l’arabe. Il faut préciser que la France et surtout Paris avaient déjà un passé assez riche dans l’orientalisme qui remontait au XIIIe siècle. Mais cette science ne prit un caractère officiel qu’au début du XVIe siècle, quand François 1er fonda, en 1530, le Collège royal pour qu’on y enseigne le grec et l’hébreu. En 1536, sous Soliman le Magnifique, l’ambassadeur de France, Jean de la Forêt, négocia un traité entre son pays et l’Empire ottoman, traité dans lequel la Turquie s’engageait à garantir à la France certains privilèges de nature politique et économique. Le sultan n’avait pas oublié que François 1er l’avait aidé dans son conflit avec l’Autriche. Ce traité commençait le régime des capitulations. Celles-ci autorisaient l’établissement de marchands français dans les territoires contrôlés par Istanbul, leur garantissant la liberté individuelle et religieuse. Les consuls de France avaient même le pouvoir de juger les affaires civiles et criminelles des ressortissants français selon les lois de leur pays, avec le droit d’appel aux magistrats du sultan. La France resta, jusqu’en 1583, la seule puissance protectrice de tous les Européens résidant en Turquie. En 1583, en effet, l’Angleterre réclama et obtint sa première capitulation et le droit de protection des sujets des autres nations, mais en 1607, sous le régime d’Ahmed 1er, les stipulations de la capitulation de 1536 furent confirmées au profit du prestige de la France. En 1539, Guillaume Postel (1505 – 1581) fut admis au rang de professeur royal. Postel est considéré comme le premier orientaliste de la Renaissance. Il venait de rentrer d’Istanbul où il avait accompagné Jean de la Forêt cité plus haut. On lui confia l’enseignement du grec, de l’hébreu et de l’arabe. On lui doit la première grammaire arabe de France et un traité détaillé sur une douzaine d’alphabets orientaux. Un orientalisme plus humaniste En 1542, Postel encourut la disgrace du roi et l’enseignement de l’arabe s’arrêta au Collège royal ; il ne devait reprendre qu’en 1587 grâce à Henri III. La diplomatie française veilla toujours à la stricte application des capitulations et à leur renouvellement pour préserver ses intérêts dans les échelles du Levant. Le besoin toujours croissant d’interprètes développa l’enseignement des langues orientales et suscita le besoin culturel et scientifique d’étudier plus profondément les civilisations des peuples qui les pratiquaient. Les jésuites furent les pionniers de cet orientalisme plus humaniste. Ils s’installèrent, dans la deuxième moitié du XVIe siècle, à Constantinople et s’en servirent comme base de départ pour les missions fondées dans la première moitié du XVIIe siècle à Alep, Damas, Tripoli, Saïda et Aintoura. C’est que durant ce siècle, l’orientalisme se structura et se spécialisa, si l’on peut dire ; on eut aussi un orientalisme religieux, un orientalisme culturel et un orientalisme politique. L’Église de France aiguillonnée par la «Réforme» et la «Renaissance» s’intéressa de plus en plus à l’étude de la Bible et des Églises d’Orient. C’est principalement pour cette raison que Savary de Brèves, retournant en 1605 de Turquie, se vit confier, en 1608, l’ambassade de Rome. Il y fonda une imprimerie pour éditer des livres religieux à l’usage des chrétiens d’Orient. Rappelé à Paris en 1616, il y ramena dans ses bagages son imprimerie et se fit accompagner par deux savants maronites, Gabriel Sionita et Jean Hesronita, anciens élèves du Collège de Rome. Ils devaient travailler ensemble à l’édition de la fameuse Bible polyglotte. En effet, le pape Grégoire XIII avait fondé en 1584 le Collège maronite de Rome à l’usage des jeunes séminaires maronites. Les diplômés de ce collège essaimèrent en Europe, à Rome, Paris, Bologne, Ravenne, Florence, Salamanque, Lisbonne, l’Escorial et Madrid… Ils furent les traducteurs et les interprètes des rois et des princes et occupèrent les chaires des langues orientales dans les plus grandes universités. On peut voir encore les noms de quelques-uns d’entre eux gravés à l’entrée du Collège de France. La Bible polyglotte Leur œuvre la plus importante fut sans conteste la Bible polyglotte. Gabriel Sionita, Jean Hesronita et Abraham Hecchellensis y travaillèrent sans relâche pendant plusieurs années. Elle finit par paraître en 1645 en sept langues : l’arabe, le syriaque, le chaldéen, l’hébreu, le samaritain, le grec et le latin. Joseph Semaan as-Semaani publia, quant à lui, la Bibliotheca Orientalis, qui est une recension de tous les manuscrits orientaux conservés à la Bibliothèque vaticane avec un résumé de chaque manuscrit. Parmi les savants maronites les plus importants, citons encore Nasrallah Chalac el-Aqouri (Vittorio Scialac Accurensis 1635), professeur d’arabe et de syriaque à la Sapientia de Rome et directeur de son imprimerie arabe. Il donna toute sa fortune pour fonder le Collège maronite de Ravenne. Youhanna Fahd el-Hasrouny (Joannes Leopardus 1632) ; il introduisit le calendrier grégorien dans l’Église maronite en 1606 et laissa une grammaire syriaque et une traduction partielle de l’œuvre de saint Thomas d’Aquin. Ishaq ach Chadraoui (Issac Sciadern, mort en 1663) ; archevêque de Tripoli, contemporain et ami de Fakhreddine II le Grand. Il se spécialisa dans le rite chaldéen et traduisit en latin l’œuvre de ses exégètes et de ses penseurs. Merhej, fils de Nairoun el-Bâni (Faustus Nairon Albanensis 1711) ; professeur de langue syriaque à la Sapientia de Rome et auteur du premier traité, en latin, sur le caféier et les bienfaits du café. Citons enfin les as-Semaani : Joseph Semaan, organisateur du Concile libanais de Louaizé et directeur de la Bibliothèque vaticane ; Estephane Aouad, archiviste de la Bibliothèque des Médicis ; Youssef Louis, professeur de syriaque à la Sapientia de Rome et interprète du pape ; Semaani, auteur de plusieurs études sur Les Arabes avant l’islam, La numismatique arabe, La calligraphie coufique et, enfin, l’Influence de l’arabe sur la poésie européenne contemporaine. Quant à Boutros Moubarac (P. Benedetti Ambarac 1742), il rejoignit la compagnie de Jésus et enseigna l’hébreu à l’Université de Pise. Il fonda le Collège d’Aintoura en 1728. Il publia l’œuvre de Saint Ephrem en syriaque, grec et latin en six volumes. Mikhaël Ghaziri, lui, archiva la bibliothèque de l’Escorial. Les causes culturelles de l’orientalisme furent surtout le souci des responsables d’enrichir les bibliothèques nationales et les musées de manuscrits et d’antiquités orientales. Les rois et leurs ministres des Affaires étrangères confiaient ce soin à leurs ambassadeurs auprès de la Sublime Porte, ainsi qu’aux consuls dans les différentes villes d’Orient. Ils y dépêchaient même quelquefois des savants dans le but d’étudier ces objets «in situ». Quant aux causes politiques, elles étaient évidentes au vu des relations étroites avec l’Empire ottoman initiées par François 1er et continuées avec bonheur par ses successeurs, Henri IV, Louis XIII et Louis XIV. Ce qui poussa Colbert à fonder une école de traducteurs à Istanbul qui fournissait chaque année six interprètes diplômés. C’est dans cet ordre d’idées qu’il faut citer la mission du dominicain Vanslib et celle du marquis de Nointel à Constantinople dont il rapporta un grand nombre d’objets antiques et de pièces de monnaies. En effet, entre 1670 et 1673 et sous le règne de Mohammed IV (1648 – 1687), Louis XIV ressentit la nécessité de renouveler les capitulations avec la Porte. C’est l’origine de la difficile mission du marquis de Nointel ; le diplomate ne réussit à obtenir le renouvellement qu’après trois ans d’efforts, en juin 1673. Il faut noter là que l’ambassade de Nointel est à l’origine de deux œuvres dramatiques célèbres : Le bourgeois gentilhomme de Molière (1670) et Bajazet de Racine (1673). Il faut aussi remarquer que ladite mission était en relation avec des préoccupations de nature religieuse : la première tentative d’œcuménisme, le rapprochement des Églises romaine et orthodoxe, après l’échec de la politique du patriarche Cyrille Lucar au synode de Jérusalem réuni en 1672. Enfin mentionnons le projet d’invasion de l’Égypte, suggéré par Leibniz à Louis XIV en 1672. Louis XIV fit répondre par son secrétaire d’État, Arnauld de Pomponne : «Je n’ai rien contre le plan d’une guerre sainte, mais de tels plans, vous le savez, ont cessé, depuis le temps de Saint-Louis, d’être à la mode».

Source : https://www.lorientlejour.com/article/354361/HISTOIRE_-_La_Renaissance_francaise_et_le_reveil_du_Liban_-_Eclosion_du_pluralisme_culturel_-__-.html

La protection des chrétiens d’Orient, héritage de François Ier

1536 : le roi de France François Ier et le sultan ottoman Soliman le Magnifique concluent une alliance contre Charles Quint, en vertu de laquelle la France protège les chrétiens d’Orient, plus particulièrement ceux du Mont-Liban et des Lieux saints.

1858 : création par des catholiques libéraux de l’Œuvre d’Orient – aujourd’hui dirigée par Mgr Pascal Gollnisch – dont le développement est notamment lié au massacre des chrétiens au Mont-Liban et à Damas en 1860.

Jusqu’à la Première Guerre mondiale : les écoles catholiques et l’enseignement en français se développent dans tout l’Empire ottoman, financés par l’État français en concurrence avec la présence russe et américaine.

Soliman le Magnifique et François Ier : pourquoi étaient-ils alliés ?

Considéré comme le plus grand sultan de l’empire ottoman, Soliman surnommé « le Magnifique » par les Occidentaux, « le Législateur » ou « le Grand » par les Turcs, règne de 1520 à 1566. Son immense territoire s’étend des Balkans jusqu’à la Perse et comprend la majorité des rivages d’Afrique du nord et de la mer Rouge. L’empire ottoman est fondé par les Turcs sur les ruines de l’empire byzantin : il se situe entre Europe et Asie et a pour capitale Constantinople.

Lire l’article https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/histoire-soliman-magnifique-francois-ier-etaient-ils-allies-13471/

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