
Partition : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1162157t/f1.image
La bonne Chanson, Op. 61, est un cycle de neuf mélodies composé par Gabriel Fauré basé sur le recueil du même nom de Paul Verlaine.
Fauré compose cette œuvre entre 1892 et 1894 alors qu’il est amoureux d’Emma Bardac et lui dédicace le cycle. La bonne chanson est écrite pour ténor et piano, mais Fauré le réarrange ensuite pour ténor, piano et quintette à cordes.
Composition :
Une sainte en son auréole
Puisque l’aube grandit
La lune blanche luit dans les bois
J’allais par des chemins perfides
J’ai presque peur, en vérité
Avant que tu ne t’en ailles
Donc, ce sera par un clair jour d’été
N’est-ce pas ?
L’hiver a cessé
- Emma Bardac
- Manuscrit autographe
- Enregistrements de la Bibliothèque nationale de France
- Une sainte en son auréole
- Puisque l’aube grandit, puisque voici l’aurore
- Avant que tu ne t’en ailles
- La lune blanche luit dans les bois
- J’allais par des chemins perfides
- J’ai presque peur, en vérité
- Avant que tu ne t’en ailles
- Donc, ce sera par un clair jour d’été
- N’est-ce pas ?
- L’hiver a cessé
- Voir aussi
Emma Bardac

Emma Bardac (née Moyse en 1862 et morte en 1934) est une cantatrice française connue pour avoir été l’amante de Gabriel Fauré et l’épouse de Claude Debussy.
Elle rencontre Fauré et entame une relation passionnelle avec lui pendant l’été 1892. Fauré écrit sa suite Dolly pour Hélène et le cycle La Bonne chanson, d’après Verlaine, pour Emma elle-même.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Emma_Bardac
Manuscrit autographe

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f1.image
Enregistrements de la Bibliothèque nationale de France

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k88118761.media
Une sainte en son auréole

Partition
La Bonne chanson (manuscrit autographe) Fauré, Gabriel (1845-1924)
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f4.image
Une Sainte en son auréole,
Une Châtelaine en sa tour,
Tout ce que contient la parole
Humaine de grâce et d’amour ;
La note d’or que fait entendre
Un cor dans le lointain des bois,
Mariée à la fierté tendre
Des nobles Dames d’autrefois ;
Avec cela le charme insigne
D’un frais sourire triomphant
Eclos dans des candeurs de cygne
Et des rougeurs de femme-enfant ;
Des Aspects nacrés, blancs et roses,
Un doux accord patricien :
Je vois, j’entends toutes ces choses
Dans son nom Carlovingien.
Paul Verlaine
Puisque l’aube grandit, puisque voici l’aurore

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f10.image
Puisque l’aube grandit, puisque voici l’aurore,
Puisque, après m’avoir fui longtemps, l’espoir veut bien
Revoler devers moi qui l’appelle et l’implore,
Puisque tout ce bonheur veut bien être le mien,
C’en est fait à présent des funestes pensées,
C’en est fait des mauvais rêves, ah ! c’en est fait
Surtout de l’ironie et des lèvres pincées
Et des mots où l’esprit sans l’âme triomphait.
Arrière aussi les poings crispés et la colère
A propos des méchants et des sots rencontrés ;
Arrière la rancune abominable ! arrière
L’oubli qu’on cherche en des breuvages exécrés !
Car je veux, maintenant qu’un Être de lumière
A dans ma nuit profonde émis cette clarté
D’une amour à la fois immortelle et première,
De par la grâce, le sourire et la bonté,
Je veux, guidé par vous, beaux yeux aux flammes douces,
Par toi conduit, ô main où tremblera ma main,
Marcher droit, que ce soit par des sentiers de mousses
Ou que rocs et cailloux encombrent le chemin ;
Oui, je veux marcher droit et calme dans la Vie,
Vers le but où le sort dirigera mes pas,
Sans violence, sans remords et sans envie :
Ce sera le devoir heureux aux gais combats.
Et comme, pour bercer les lenteurs de la route,
Je chanterai des airs ingénus, je me dis
Qu’elle m’écoutera sans déplaisir sans doute ;
Et vraiment je ne veux pas d’autre Paradis.
Paul Verlaine
Avant que tu ne t’en ailles

La Bonne chanson (manuscrit autographe) Fauré, Gabriel (1845-1924) (voir la partition https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f42.image
Avant que tu ne t’en ailles,
Pâle étoile du matin,
– Mille cailles
Chantent, chantent dans le thym. –
Tourne devers le poète,
Dont les yeux sont pleins d’amour;
– L’alouette
Monte au ciel avec le jour. –
Tourne ton regard que noie
L’aurore dans son azur;
– Quelle joie
Parmi les champs de blé mûr ! –
Puis fais luire ma pensée
Là-bas – bien loin, oh, bien loin !
– La rosée
Gaîment brille sur le foin. –
Dans le doux rêve où s’agite
Ma mie endormie encor…
– Vite, vite,
Car voici le soleil d’or.
Paul Verlaine
La lune blanche luit dans les bois

La Bonne chanson (manuscrit autographe) Fauré, Gabriel (1845-1924).
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f18.image
La lune blanche
Luit dans les bois ;
De chaque branche
Part une voix
Sous la ramée…
Ô bien-aimée.
L’étang reflète,
Profond miroir,
La silhouette
Du saule noir
Où le vent pleure…
Rêvons, c’est l’heure.
Un vaste et tendre
Apaisement
Semble descendre
Du firmament
Que l’astre irise…
C’est l’heure exquise.
Paul Verlaine
J’allais par des chemins perfides

La Bonne chanson (manuscrit autographe) Fauré, Gabriel (1845-1924)
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f24.image
J’allais par des chemins perfides,
Douloureusement incertain.
Vos chères mains furent mes guides.
Si pâle à l’horizon lointain
Luisait un faible espoir d’aurore ;
Votre regard fut le matin.
Nul bruit, sinon son pas sonore,
N’encourageait le voyageur.
Votre voix me dit : » Marche encore ! «
Mon coeur craintif, mon sombre coeur
Pleurait, seul, sur la triste voie ;
L’amour, délicieux vainqueur,
Nous a réunis dans la joie.
Paul Verlaine
J’ai presque peur, en vérité

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f33.image
J’ai presque peur, en vérité,
Tant je sens ma vie enlacée
A la radieuse pensée
Qui m’a pris l’âme l’autre été,
Tant votre image, à jamais chère,
Habite en ce coeur tout à vous,
Mon coeur uniquement jaloux
De vous aimer et de vous plaire ;
Et je tremble, pardonnez-moi
D’aussi franchement vous le dire,
A penser qu’un mot, un sourire
De vous est désormais ma loi,
Et qu’il vous suffirait d’un geste.
D’une parole ou d’un clin d’oeil,
Pour mettre tout mon être en deuil
De son illusion céleste.
Mais plutôt je ne veux vous voir,
L’avenir dût-il m’être sombre
Et fécond en peines sans nombre,
Qu’à travers un immense espoir,
Plongé dans ce bonheur suprême
De me dire encore et toujours,
En dépit des mornes retours,
Que je vous aime, que je t’aime !
Paul Verlaine
Avant que tu ne t’en ailles

Partition
La Bonne chanson (manuscrit autographe) Fauré, Gabriel (1845-1924)
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f42.image
Avant que tu ne t’en ailles,
Pâle étoile du matin,
– Mille cailles
Chantent, chantent dans le thym. –
Tourne devers le poète,
Dont les yeux sont pleins d’amour;
– L’alouette
Monte au ciel avec le jour. –
Tourne ton regard que noie
L’aurore dans son azur;
– Quelle joie
Parmi les champs de blé mûr ! –
Puis fais luire ma pensée
Là-bas – bien loin, oh, bien loin !
– La rosée
Gaîment brille sur le foin. –
Dans le doux rêve où s’agite
Ma mie endormie encor…
– Vite, vite,
Car voici le soleil d’or.
Pau Verlaine
Donc, ce sera par un clair jour d’été

Partition
La Bonne chanson (manuscrit autographe) Fauré, Gabriel (1845-1924).
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b525009300/f51.image
Donc, ce sera par un clair jour d’été ;
Le grand soleil, complice de ma joie,
Fera, parmi le satin et la soie,
Plus belle encor votre chère beauté ;
Le ciel tout bleu, comme une haute tente,
Frissonnera somptueux à longs plis
Sur nos deux fronts heureux qu’auront pâlis
L’émotion du bonheur et l’attente ;
Et quand le soir viendra, l’air sera doux
Qui se jouera, caressant, dans vos voiles,
Et les regards paisibles des étoiles
Bienveillamment souriront aux époux.
Pau Verlaine
N’est-ce pas ?

N’est-ce pas ? en dépit des sots et des méchants
Qui ne manqueront pas d’envier notre joie,
Nous serons fiers parfois et toujours indulgents.
N’est-ce pas ? nous irons, gais et lents, dans la voie
Modeste que nous montre en souriant l’Espoir,
Peu soucieux qu’on nous ignore ou qu’on nous voie.
Isolés dans l’amour ainsi qu’en un bois noir,
Nos deux coeurs, exhalant leur tendresse paisible,
Seront deux rossignols qui chantent dans le soir.
Quant au Monde, qu’il soit envers nous irascible
Ou doux, que nous feront ses gestes ? Il peut bien,
S’il veut, nous caresser ou nous prendre pour cible.
Unis par le plus fort et le plus cher lien,
Et d’ailleurs, possédant l’armure adamantine,
Nous sourirons à tous et n’aurons peur de rien.
Sans nous préoccuper de ce que nous destine
Le Sort, nous marcherons pourtant du même pas,
Et la main dans la main, avec l’âme enfantine
De ceux qui s’aiment saris mélange, n’est-ce pas ?
Pau Verlaine
L’hiver a cessé

L’hiver a cessé : la lumière est tiède
Et danse, du sol au firmament clair.
Il faut que le coeur le plus triste cède
A l’immense joie éparse dans l’air.
Même ce Paris maussade et malade
Semble faire accueil aux jeunes soleils,
Et comme pour une immense accolade
Tend les mille bras de ses toits vermeils.
J’ai depuis un an le printemps dans l’âme
Et le vert retour du doux floréal,
Ainsi qu’une flamme entoure une flamme,
Met de l’idéal sur mon idéal.
Le ciel bleu prolonge, exhausse et couronne
L’immuable azur où rit mon amour.
La saison est belle et ma part est bonne
Et tous mes espoirs ont enfin leur tour.
Que vienne l’été ! que vienne encore
L’automne et l’hiver ! Et chaque saison
Me sera charmante, ô Toi que décore
Cette fantaisie et cette raison !
Paul Verlaine